Au dessus de la Loire, le soleil couchant perce d'une flamme rougie les cendres du ciel. J'ai décidé de reprendre la route, encore faible, aprés un recueillement solidaire en famille. Depuis le 18 juin, j'affronte la mort. J'ai perdu celle qui m'a donné la vie. Maman, Je marche le coeur gonflé du souvenir. Je me tiens debout à côté du vide, le visage cramé par les larmes. Des rivières de détresse, de relachement. Une écume entre les êtres. Tant de monde te pleure. Tu étais la générosité, l'énergie et la beauté. Je parle à voix haute. J'interroge ta présence. Je refuse le néant. J'entends une réponse à la fois vaste et minuscule dans le chant d'un oiseau posé sur la branche au dessus de ma tête, dans l'odeur restée sur tes foulards, dans les ricochets que font tes petits enfants sur le lac, dans cette quête d'étoiles sur le gravier. Je sens ta palpitation dans les plis de la nuit où le rêve me rend ton visage. Je déteste le dehors agité des villes, leur vitesse, leur vulgarité, tout ce qui piètine mon chagrin et ta grâce. Je trouve un souffle dans la forêt prés du ruisseau où je crois t'atteindre. Me voilà dans l'expérience du vrai couperet de l'absence, je cotoie la bête féroce du deuil. Heureusement la sensation pleine de l'amour ne meurt pas. Au contraire, elle s'amplifie. S'inventer une suite, un au delà, un aprés pour ne pas sombrer! Ne pas devenir fous! L'espèrance se lit dans des signes infimes, la lumière se cherche dans les coins. Voilà des années que j'écoute l'invisible, tu y danses désormais et je n'aurai cesse de t'y chercher. Quand mon coeur se décourage dans ce salon du livre sous hospices d'un ciel pluvieux, je t'invoque, te parle . Un monsieur s'avance, s'intéresse à mon album. il l'achète pour l'offrir, réfléchit un moment au prénom du destinataire... Je signe ma première dédicace de la journée pour Myriam, ton prénom Maman!